Rapport annuel de la présidence 2005-2006

Pierre BURI, président
21 février 2007

 

Une grande année !

 Le rapport de l’exercice précédent annonçait deux projets importants pour la Société Académique, qui devaient se concrétiser au cours de cette année. C’est aujourd’hui chose faite et l’auteur de ces lignes est heureux de commencer ce message annuel par le descriptif de ces réalisations.

Les travaux intensifs de la Commission du Fonds Foremane (Fonds de recherche pour les maladies neurodégénératives) ont abouti à la nomination d’un professeur ordinaire en neurosciences, premier « professeur Société Académique de Genève » de notre histoire, après 118 ans d’existence ! Parmi toutes les candidatures, la personnalité retenue par l’Université et nommée par le Conseil d’Etat est le Professeur Patrik Vuilleumier. Résumons très brièvement son impressionnant curriculum vitae. Né à Genève en 1965, ce nouveau professeur ordinaire fit ses études de médecine dans cette cité puis occupa plusieurs positions, tant dans différentes villes suisses qu’à Londres, Paris ou encore à l’Université de Californie. Il compléta ses études par divers cours complémentaires et certificats post-gradués et obtint son FMH de neurologie en 1997. Son CV mentionne également l’obtention de nombreuses bourses et de prix prestigieux. Patrik Vuilleumier est l’auteur d’une centaine de publications dans des revues spécialisées de portée internationale et d’une douzaine de chapitres de livres. Actuellement chef de groupe du laboratoire de neuroimagerie cognitive du Centre Médical Universitaire de Genève et titulaire de la chaire de neuroscience Foremane, il a la responsabilité de l’installation d’un système IRM, acquis également grâce à ce  Fonds de la Société Académique. Pour situer cette recherche et éviter toute interprétation erronée, citons une petite partie du descriptif rédigé par Patrik Vuilleumier lui-même.

 » L’étude des mécanismes cérébraux des fonctions mentales chez l’être humain et de leur perturbation lors de dysfonctions neurobiologiques constitue un des enjeux les plus fascinants des sciences modernes. Des progrès immenses ont été accomplis. En particulier, les techniques d’imagerie par résonance magnétique (IRM) permettent de visualiser non seulement la structure des différentes régions anatomiques du cerveau, mais aussi de mesurer l’activité neuronale qui est évoquée par différentes conditions ou différents états mentaux — par exemple lors de la reconnaissance d’un visage, lors de pensées ou de souvenirs, lors d’émotions, ou lors de phénomènes pathologiques comme des hallucinations. L’avancée de ces techniques a révolutionné la recherche, et elle a suscité de nouveaux champs d’investigation en neurosciences et en neuroimagerie cognitives, aux frontières entre neurologie, psychiatrie, psychologie, radiologie, et informatique. De nombreux centres spécialisés dans l’application des techniques de neuroimagerie aux fonctions cognitives ont été créés dans le monde entier, et aujourd’hui l’IRM fonctionnelle constitue un outil central de la recherche en neuroscience, aussi bien chez l’homme que chez l’animal (grand ou petit, singe ou rat).

La recherche en neurosciences constitue un atout fort de l’Université de Genève et de la Faculté de médecine, avec plus de 15 groupes activement impliqués dans l’imagerie cérébrale IRM. Toutefois, il n’existe pas de plateforme d’imagerie spécifiquement dédié à la neuroimagerie cognitive à Genève, contrairement à ce qui existe dans beaucoup d’autres centres. L’installation d’un nouveau système au CMU a donc pour but principal de renforcer la recherche en neurosciences par des moyens nouveaux, en lien avec la création d’une nouvelle chaire professorale, et en synergie avec d’autres efforts dans l’arc lémanique pour la création d’un pôle compétitif à la fois dans le domaine des sciences du cerveau et celui de l’imagerie médicale ».

Les membres de la Société Académique et son Comité adressent  leurs félicitations au professeur Patrik Vuilleumier pour sa nomination et forment tous leurs vœux pour la poursuite de ses recherches dans le domaine souhaité par les généreux donateurs du Fonds Foremane. Nos remerciements s’adressent aux membres de la Commission du Fonds pour avoir mené à bien toutes les études et démarches qui ont abouti à cette nomination, dans les meilleurs délais tout en respectant les règles et procédures universitaires, en particulier au professeur Jean-Louis Carpentier, doyen de la Faculté de médecine et au professeur Jean-Michel Dayer, membre de notre Comité.

Second évènement positif et réjouissant, la réfection complète de notre salle de réunion à la BPU. Triste depuis toujours par ses couleurs  (ou par son absence de couleurs…), peu pratique par sa conception et son équipement, inconfortable par son mobilier disparate et inadapté, elle offre aujourd’hui un lieu de travail moderne, pratique, convivial, chaleureux, bien équipé en mobilier intégralement changé, dont certains éléments ont été conçus et dessinés en fonction des besoins, avec une installation audio-visuelle efficace et élégante. Rappelons que cette salle respectable fut mise, peu avant la dernière guerre, à la disposition de la Société Académique par la Ville de Genève, en reconnaissance de la grande générosité de cette dernière, qui avait permis à l’époque une très profonde transformation de la BPU.

Cette transformation, souhaitée par le Comité, réalisée avec les intérêts d’un de nos fonds…et le feu vert du trésorier, n’aboutit qu’après de longues et laborieuses tractations avec six services de la Ville de Genève et du Département du Territoire. Les documents accumulés pendant des dizaines d’années ont tous été triés, reclassés et disposés dans la salle elle-même ou stockés dans les archives. Leur redécouverte, puis la lecture de certains d’entre eux, furent fort instructives, cocasses ou amusantes. Par des coupures de journaux jaunies et poussiéreuses, ou par des rapports présidentiels, souvent véritables petites merveilles de littérature, on apprend par exemple que les conférences prestigieuses de nos assemblées générales annuelles étaient généreusement relatées par la presse locale. Il y a longtemps qu’elle s’en désintéresse, d’autres aspects de la vie universitaire retenant aujourd’hui toute son attention. Toujours par la lecture de ces documents, on apprend sans réelle surprise que des personnalités politiques faisaient déjà l’objet de critiques acerbes. Par exemple, citons un savoureux extrait de rapport, non daté, sous le titre Le coq du poulailler, au sujet d’un conseiller d’état :

« On s’étonne que M. R. n’ait pas assisté à la récente assemblée de la Société Académique à laquelle il avait été invité. La raison en est cependant bien simple : c’est qu’il n’était pas appelé à y présider. Beaucoup de gens viennent au monde avec une vocation décidée. Il y en a qui naissent poètes, d’autres naissent rôtisseurs, d’autres… M .R., lui, est né président. Président de quoi ? De n’importe quoi, pourvu qu’il préside. Assister à une réunion sans y présider lui cause la plus grande des souffrances… »

Quelques objets et photos judicieusement exposés rappellent certains grands moments de l’histoire de la Société et montrent qu’elle dispose d’un patrimoine non dépourvu d’intérêt. Parmi des centaines de lettres manuscrites, retrouvées et classées chronologiquement, on en trouve de la main et de la belle écriture d’anciens recteurs ou conseillers d’état. Ils remerciaient eux-mêmes la Société Académique pour l’octroi d’une bourse ou pour l’achat d’un appareil !

Vous l’aurez remarqué en recevant le nouveau bulletin, pris dans notre élan de modernisation, nous avons repensé le logo de la Société académique et le graphisme de ses différents documents, non par mépris de la bleue et pensive Athéna mais par souci de lisibilité; la déesse aux yeux pers a été remplacée par un motif géométrique bien différent dans sa signification, sobre, symbolisant  le mouvement, l’évolution vers le haut. L’ancien graphisme manquait de lisibilité.

Forum de l’Université

Après un début modeste et quelques lenteurs liées principalement à des problèmes de logistique, le troisième Forum, Démocratie et terrorisme, est maintenant bien lancé sur ses rails. Cette première année d’existence sous la direction et la responsabilité des professeurs Alexis Keller et Andrea Bianchi, a été marquée, et très remarquée, par plusieurs séries d’évènements. Un premier volet « recherche » constitua une partie importante des activités. La « Conférence sur la démocratie, la séparation des pouvoirs et la lutte contre le terrorisme » eut lieu à Genève du 16 au 18 novembre 2006. Une table ronde a ouvert cette Conférence avec plusieurs personnalités de réputation internationale. Citons Geoffrey Robertson, juge au Tribunal spécial pour la Sierra Leone, Alex Boraine, Président de l’International Center for Transitional Justice ou encore Christine van den Wyngaert, juge au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. L’audience comptait plus de 400 personnes. Les deux journées qui ont suivi la table ronde ont réuni des spécialistes des sciences politiques, de l’histoire, du droit international, du droit pénal et du droit constitutionnel afin de débattre, à la lumière de ces différentes disciplines, de l’impact du terrorisme sur la démocratie. Les actes de la conférence donneront lieu à une publication. Merci à Monique Caillat, membre du Comité, d’avoir avantageusement remplacé le président, en voyage à cette époque, pour adresser à l’assemblée un message de bienvenue.

Toujours dans le domaine de la recherche, relevons un projet sur la guerre et le terrorisme en droit international et des études scientifiques sur la mise en œuvre nationale des résolutions du Conseil de Sécurité en matière de lutte contre le terrorisme. Notons encore la mise en place par le Forum d’un réseau de chercheurs travaillant sur le phénomène du terrorisme international, dynamisé et élargi grâce à la Conférence de novembre.

Le volet « diffusion publique » comprend l’élaboration d’un site Internet (www.forumDT.ch) présentant les activités du Forum. Antoine Garapon, magistrat français, a inauguré le 6 décembre 2005 un cycle de cinq conférences publiques,  » Les Midis « , qui ont suscité l’intérêt des milieux académiques et du grand public.

Le programme 2006-2007 est prêt et concernera les mêmes volets, sous des formes quelque peu différentes, des films-débats sur le thème du terrorisme en image remplaçant par exemple la Conférence de cette année.

Requêtes

N’oublions pas que la tâche principale du Comité concerne l’examen des requêtes, dont 115 acceptées cette année. La répartition des allocations figure dans le rapport du trésorier. On constate que près de la moitié des sommes attribuées vont aux sciences humaines, la médecine et les sciences se partageant l’autre moitié, proportionnalité quelque peu variable d’une année à l’autre. Ces chiffres sont logiques : les sciences humaines comprennent plusieurs facultés. De plus, si elles n’ont pas besoin d’un équipement très lourd comme celui des Facultés des sciences ou de médecine, elles ont par contre plus de difficultés à trouver des fonds extérieurs, ne pouvant guère s’adresser à l’industrie, comme le font les scientifiques. Cette remarque n’empêche pas le Président à inciter chercheurs et enseignants de ces facultés à accroître leurs efforts de recherche de subsides auprès d’autres sources également. Enfin la part du Forum est comprise dans ce pourcentage.

Chaque année, nous acceptons des requêtes pour l’impression d’ouvrages, tels que catalogues, actes de congrès ou colloques, livres divers. Un exemplaire de chacune de ces publications est remis à la Société académique et de très beaux livres, exposés maintenant sur les nouveaux rayonnages de notre salle, enrichissant régulièrement notre collection, témoins de notre aide.

La somptueuse exposition actuelle du Musée Rath est une occasion de rappeler l’existence du Fonds auxiliaire de la Bibliothèque publique universitaire, destiné à l’acquisition d’ouvrages ou de manuscrits. Il y a donc de fortes chances que l’une ou l’autre des pièces exposées aient été achetées grâce à ce Fonds de notre Société, du moins partiellement. Ainsi, la Société Académique soutient non seulement l’Université mais aussi des institutions de la Ville de Genève, même si cela ne figure pas dans ses statuts.

Assemblée générale extraordinaire

Le 5 décembre, une Assemblée générale extraordinaire fut convoquée, avec un seul point à l’ordre du jour, soit une modification de l’Art.26 des statuts régissant la Société Académique, demandée par le service responsable des exonérations d’impôts de l’Administration fiscale cantonale. Cette modification a été acceptée à l’unanimité des personnes présentes. Elles sont remerciées de s’être déplacées pour ce point mineur d’apparence, mais dont le statu quo aurait pu engendrer de lourdes répercussions financières.

 Renouvellement du Comité

Deux membres de notre Comité nous ont fait part du désir de se retirer, à notre grand regret. Il s’agit des professeurs Jean-Claude Pont, qui nous quitte pour des raisons personnelles et Bertrand Cramer, membre assidu depuis de fort nombreuses années, principalement responsables des questions de médecine psychiatriques et des requêtes de la FAPSE. Qu’ils soient tous deux chaleureusement remerciés pour le travail accompli au cours de leurs mandats, pour ce qu’ils ont apporté à la Société Académique et pour leur amitié. Leur remplacement fait actuellement l’objet de notre réflexion et leurs successeurs seront soumis à vos suffrages en temps voulu.

Les membres du Comité, rappelons-le, sont élus pour des mandats de deux ans renouvelables. Nous soumettons donc à votre approbation les noms des membres qui en ont accepté un nouveau : Jean-Michel Dayer, André Hurst, Bertrand Kiefer, Jaques Naef et Pierre Buri.

Remerciements

Si la coutume veut que cette rubrique figure annuellement en fin de rapport, on pourrait aussi changer la tradition et, une prochaine fois, commencer par elle ! En effet rien de ce qui a été décrit ci-dessus ne serait réalisable sans le travail, le dévouement, l’intérêt et la participation active à une réflexion globale de tous les membres du Comité. Je les remercie non seulement pour leur principal et lourd travail d’évaluation des requêtes, mais aussi pour leur collaboration et leur participation à la bonne marche de notre Société, leurs suggestions constructives, leurs initiatives, leur enthousiasme et leur amitié.

On connaît depuis longtemps les qualités de secrétaire, de secouriste et d’organisatrice de Caroline Baltzinger. Or elle a révélé de plus, lors de la transformation de la salle de réunion, de redoutables performances de déménageuse de lourds cartons d’archives, une résistance à toute épreuve à la poussière séculaire et un respect louable pour la survie des documents anciens. Elle a reclassé avec zèle des papiers dispersés au hasard du temps, de la succession des présidents et des autres secrétaires, retrouvés dans une infinité d’enveloppes, de fourres en cartons, de classeurs, de chemises plastiques, en piles ou en rouleaux. En résumé, un grand merci à Caroline de la part de tout le Comité.

Nos remerciements s’adressent également à Jaques Naef, Président de La Linnaea, qui a organisé dans ce si beau jardin alpin la raclette traditionnelle des sponsors. Par un temps radieux, une trentaine de personnes ont eu ainsi le privilège d’admirer le site dans toute sa splendeur du début de l’été et de profiter des explications des jardiniers responsables, également présents.

Le terme de trésorier est quelque peu restrictif pour décrire les multiples activités et centres d’intérêt de Renaud Gagnebin au sein de notre Société, depuis l’année lointaine où il a repris cette fonction. Qu’il soit remercié de gérer à merveille notre trésor et de s’investir également dans d’autres domaines, par exemple le Forum de l’Université.

Merci donc à tous ceux qui permettent à notre Société d’œuvrer avec efficacité pour le bien de l’Université de Genève, de ses étudiants, de ses enseignants et de ses chercheurs, gratitude qui s’adresse également, et de toute évidence, à l’ensemble des membres de la Société Académique.